Séries 2019 : mes déceptions de l’été

Comme chaque été, de nombreuses séries ont enflammé les spectateurs et échauffé les esprits. Sur le web et les réseaux sociaux, les avis élogieux, les réactions spontanées et les enthousiasmes démesurés sont devenus légion. Pourtant, après ces temps caniculaires, il est bon de refroidir un peu l’atmosphère.  Pour ne pas brûler trop vite les étapes dans la relation émotionnelle qui nous unit aux séries télévisées, il faut prendre le temps d’apprécier, de digérer, de réfléchir sur ce qui nous est donné à voir. Dans quelques années, certaines séries viendront encore réchauffer nos cœurs ; pour d’autres, seulement quelques semaines après leur visionnage, les souvenirs s’éteignent à petit feu. Pour éviter la douche froide, voici donc quelques avis négatifs sur des séries qui ont plutôt le vent en poupe.


The OA ~ Brit Marling

Ce fut le grand événement de l’été : après l’annulation de Sense8 il y a deux ans, Netflix a décidé de couper court à The OA, sa nouvelle série phare. Il n’y aura donc pas de troisième saison pour le bébé de Brit Marling, au grand dam des nombreux fans. Difficile pourtant d’expliquer un tel succès, tant la série, de ses premiers instants à son dernier souffle, peine à mettre de l’ordre dans ses idées. Voyage interdimensionnel, mémoire émotionnelle, expérience de mort imminente, univers multiples : autant de sujets passionnants que The OA se contente d’effleurer sans profondeur ni réelle cohérence. Malgré quelques fulgurances et des acteurs convaincants (mention spéciale à Phyllis Smith, grand bloc de douceur et de sincérité), notamment dans les scènes où les liens entre les personnages s’expriment pleinement, la série s’embourbe rapidement dans un grand chaos métaphysique et mystique, à travers des épisodes assez mal construits en plus d’être souvent ennuyeux. Si son annulation a provoqué chez certains une immense déception ou un réel soulagement chez les autres, The OA n’aura dans tous les cas pas manqué de nous laisser sur notre faim jusque dans les aléas de sa production.


Years and Years ~ Russell T. Davies

Les dystopies sont devenues monnaie courante à la télévision : après Black Mirror et The Handmaid’s Tale, c’est à Years and Years de faire une entrée fracassante sur nos petits écrans. Il faut dire que la série a su se montrer affutée pour dépeindre de façon réaliste notre futur proche : sort des migrants, montée du fascisme, transhumanisme, implosion du capitalisme, attaques nucléaires et dérèglement climatique sont autant de sujets que la série utilise pour s’ancrer pleinement dans notre actualité. Cependant, par sa courte durée (seulement six épisodes) et ses sauts dans le temps, la série ne nous permet pas de nous attacher aux personnages, censés être proches de nous par leurs préoccupations et leurs idéaux. Years and Years se montre également problématique au sein même de sa représentation : dans l’épisode 4, la fuite des migrants vers l’Angleterre et son dénouement tragique ont bouleversé la majorité des spectateurs. D’un point de vue éthique, peut-on vraiment s’émouvoir face à cette situation fictive alors que le même évènement, dans notre réalité, nous laisse indifférents ? Tout le caractère racoleur et superficiel de Years and Years s’exprime alors ici, privilégiant la sensation à la réflexion. Malgré un épisode final qui appelle à la révolution, la série n’aura pas véritablement réussi à exorciser les tourments majeurs de notre temps.


Big Little Lies (saison 2) ~ Andrea Arnold

Big Little Lies ne devait être à la base qu’une mini-série de sept épisodes. Face à l’engouement général pour ce programme féminin et féministe, HBO a décidé de produire une seconde saison (et peut-être plus si affinités…). Retour, donc, à Monterey pour la suite des aventures de Celeste, Jane, Madeline, Renata et Bonnie, femmes au foyer désespérées liées par un secret aux circonstances aggravantes. Si la série se montre particulièrement investie dans le destin de ces femmes toutes différentes mais intimement soudées, ainsi que dans leurs façons respectives de gérer le drame dont elles sont à l’origine, le montage abrupt et l’ambiance morose rendent cette seconde saison bien difficile à traverser. Malgré un casting qui n’en finit pas de se montrer incroyable (rejoint cette année par l’immense Meryl Streep, dans un rôle malheureusement trop cliché et détestable), la série semble bel et bien prolonger inutilement une première saison qui se suffisait largement à elle-même. Plus préoccupée par son aura féministe que par sa qualité esthétique, Big Little Lies est bien loin de se montrer à la hauteur de ses prétentions politiques et sociétales.


Killing Eve (saison 2) ~ Phoebe Waller-Bridge

C’était l’une des meilleures séries de l’an passé : avec ses personnages féminins hors des sentiers battus, son suspense teinté d’humour noir et son coup de balai impertinent dans les codes de représentation télévisuels, Killing Eve avait su séduire un large public. Un an après, la série a quelque peu perdu de son charme : les situations sont de plus en plus saugrenues, la fascination mutuelle entre Eve et Villanelle n’est pas loin de frôler le romantisme convenu, et l’ennui s’est bel et bien installé dans ce jeu du chat et de la souris de moins en moins palpitant. Même l’excellente Jodie Comer, dont le rôle de psychopathe s’est considérablement assagi, ne parvient pas à revigorer un ensemble prévisible et monotone. À l’instar de Big Little Lies, Killing Eve souffre d’une deuxième saison bancale et peu inspirée, qu’on aurait préféré bien plus insolente et engagée. La déception est forcément au rendez-vous, car Phoebe Waller-Bridge est sans conteste l’une des créatrices les plus importantes du paysage audiovisuel contemporain, et l’on espère la retrouver plus en forme prochainement, de préférence dans un programme dans la lignée douce et folle de Fleabag.


Four Weddings and a Funeral ~ Mindy Kaling & Matt Warburton

Où est donc passée la Mindy Kaling drôle, pétillante et impertinente de The Office et The Mindy Project ? La question se pose réellement tant, depuis les deux séries comiques qui ont lancé sa carrière, Mindy Kaling semble se fourvoyer dans des projets tous plus fades les uns que les autres. Si sa percée à Hollywood est plutôt timide, son évolution télévisuelle fulgurante privilégie souvent la quantité à la qualité. Après l’annulation de Champions, son dernier essai largement dispensable, Mindy Kaling se lance désormais dans une série très librement inspirée de Quatre mariages et un enterrement. Dans cette rom-com compassée, les personnages sont certes attachants, mais force est de constater que la modernité, l’humour et le plaisir coupable manquent cruellement à l’appel. À trop vouloir coller aux comédies romantiques des années 1990 (premier degré inclus), la créatrice se perd dans un romantisme désuet et ressuscite les pires clichés du genre, en oubliant au placard son sens du dialogue et son goût pour la transgression. Espérons pour la suite que Mindy Kaling saura retrouver l’inspiration et continuera de nous faire rire tout en mettant à mal les stéréotypes de notre société contemporaine.

6 réflexions sur « Séries 2019 : mes déceptions de l’été »

  1. Bonsoir Émilie ! Pour ma part, j’ai adhéré à « The OA ». Je n’ai pas tout saisi de cette saison 2 mais je me suis laissé porté par les acteurs/actrices qui sont excellents. C’est une série qui ne laisse pas indifférent c’est vrai. J’ai regretté que Netflix préfère miser sur « Elite 2 » plutôt que sur « The OA » saison 3.. j’aurais voulu une véritable fin à cette odyssée. C’est dommage. Toujours autant de plaisir à te lire. Excellent weekend Émilie et @très bientôt 😊

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    1. Bonsoir Frédéric ! Je connais ton engouement pour The OA, et je le respecte tout à fait ! Je dois avouer que la première saison, dans ses flottements, sa lenteur, son mystère, m’intriguait dix fois plus que la seconde, qui part totalement en cacahuète pour moi ! Et cette fin, quelle frustration !
      Ah, Elite ! J’ai enfin fini la première saison (six mois après avoir commencé, tout va bien !), et c’est bien ficelé mais pas la meilleure série adolescente selon moi. Je ne regarderai pas la saison 2 !
      A très bientôt Frédéric, un très bon week-end à toi ! 🙂

      Aimé par 1 personne

    1. C’est certain, mais ils y a des bonnes et des mauvaises façons de le faire… C’est moins grossier et ridicule que dans Black Mirror, mais ça reste hyper gênant, je trouve. Je n’ai pas lu non plus d’autres avis négatifs, mais ce n’est que mon sentiment…

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