Modern Love
Le cinéma revêt parfois la couleur des rêves. Des couleurs à la fois douces et teintées de réel, dans lesquelles l’on aimerait s’abandonner tout entier, ne serait-ce que le temps d’un film. Offert dans un écrin par le jeune cinéaste Damien Chazelle – déjà remarqué pour son énergique Whiplash –, La La Land fait partie de ces œuvres si oniriques que leur charme opère instantanément, envoûte jusqu’à l’ivresse, puis perdure bien après la vision du film, peut-être pour toujours. Dans un tourbillon de classicisme et de modernité, le cinéaste fait valser une élégance d’antan et un propos actuel pour donner naissance à un objet à l’hybridité merveilleuse, dont les éclats ne sont pas près de se ternir.
Le film fascine d’abord par son enveloppe classique : décors majestueux, costumes somptueux, chorégraphies et airs entêtants font de La La Land une grande comédie musicale à l’ancienne, où les personnages n’hésitent pas à pousser la chansonnette pour exprimer leurs sentiments et à enchaîner les pas de danse. Portant un véritable culte aux œuvres mythiques du genre musical, Damien Chazelle nous rappelle les grandes heures d’Hollywood, du temps de Chantons sous la pluie, West Side Story ou encore Tous en scène. Dans cet hommage ambitieux, le film nous offre des images lumineuses, presque hypnotisantes, portées par une alchimie délicieuse entre Ryan Gosling et Emma Stone, où la poésie des gestes et la grâce des mots se mêlent à un amour qui, par moments, semble capable de triompher de tout.
Assumant pleinement son ambiance nostalgique, La La Land se pare également d’une modernité virtuose. Serti d’un montage dynamique, d’un humour réflexif et d’une réalisation vertigineuse, le film choisit de nous montrer l’envers de ce décor idyllique, à travers les destins de Mia, actrice amatrice qui rêve de percer sur grand écran, et de Sebastian, pianiste de jazz dont le talent peine à être reconnu à sa juste valeur. Dans un élan de réalisme, La La Land nous emmène dans les coulisses du show-business, où les auditions ratées, les disputes sur les plateaux de tournage et les séances photos sensationnalistes sont de mise et où les personnages trouvent difficilement leur place. À la façon de Jacques Demy dans Les Parapluies de Cherbourg ou Les Demoiselles de Rochefort, Damien Chazelle nous plonge surtout dans les affres de la vraie vie : rencontres désastreuses, scènes de baiser interrompues subitement et relation parcourue de frissons et de conflits font de La La Land une sublime romance des temps modernes.
Cependant, si l’histoire d’amour ne suit pas un chemin tout tracé comme dans une comédie musicale classique, il n’en reste pas moins que celle-ci nous terrasse, tant par ses joies que par ses peines. Dans un dénouement d’une tristesse éblouissante, se cristallisent tous les clichés attendus par le spectateur en quête de romance à l’eau de rose, ainsi que les espoirs déçus des personnages, qui imaginent la direction que leur vie aurait pu prendre si leurs choix avaient été différents et leurs rêves plus rapidement concrétisés. Dans ce dénouement d’une modernité implacable et habité par une mélodie déchirante, Damien Chazelle, avec une maîtrise parfaite des images et des émotions, édicte l’impossible retour de la romance classique et dessine l’horizon d’un genre nouveau : celui de la comédie musicale contemporaine, nimbé tout à la fois d’euphorie, d’audace et de renoncements.
Au rythme de cette romance colorée et galvanisante, Damien Chazelle choisit de nous confronter à la vie réelle, à ses méandres et ses chagrins, sans pour autant, ne serait-ce qu’un seul instant, laisser s’installer l’amertume et le désenchantement. Pour son troisième long-métrage, dans lequel l’amour de l’art et la passion de la musique resplendissent plus que jamais, le cinéaste côtoie les sommets en nous livrant sans conteste l’un des plus beaux films de ces dernières années. À l’image du parcours de Sebastian, Chazelle oscille entre classicisme et modernité, fait s’embrasser deux époques et deux esthétiques pour mieux redonner à la comédie musicale ses lettres de noblesse et réhabiliter ce genre cinématographique tombé en désuétude, au sein même d’un XXIe siècle peuplé d’êtres qui ont désappris à chanter l’amour et à danser la vie.
Coucou Emilie ! ton texte est absolument sublime. Je souscris totalement à ta phrase de conclusion qui en plus d’être belle est profondément juste je trouve. Ce film suscite des critiques dithyrambiques ! je ne suis pas très comédie musicale mais le casting et ce que tu en dis fait drôlement envie. Prochain film pour moi le Scorcese « Silence » mardi prochain. On en reparlera ensemble j’en suis sûr. Très sincèrement, tu as le blog que je préfère sur WordPress ! c’est brillant, touchant, ton amour du 7ème art, ta sensibilité, bref c’est un plaisir d’échanger avec toi ! Bonne soirée Emilie 🙂
J’aimeAimé par 1 personne
Pour moi, ce film est une merveille sur tous les plans : visuel, musical, scénaristique, émotionnel ! Je reconnais qu’il faut bien connaître le genre de la comédie musicale pour saisir toutes les subtilités du film, mais dans tous les cas, c’est un régal pour les yeux, les oreilles et le coeur ! Je compte également aller voir Silence, qui a de bonnes critiques également, en tout cas à ce que j’en ai vu… Merci beaucoup pour tes compliments Frédéric, ça me touche énormément ! J’essaie de faire de mon mieux pour transmettre ma passion et mes coups de coeur ! Bonne soirée à toi aussi et à bientôt 🙂
J’aimeAimé par 1 personne
le niveau musical est parfois faiblard : on ne peut pas vraiment ne pas se lasser de la BO. Pourtant, l osmose est parfaite avec les images
j aime d ailleurs le fait que la même chanson puisse être déclinée…
tu sais écrire, by the way
je m’abonne 😉
J’aimeAimé par 1 personne
Je reconnais que le chant des deux acteurs n’est pas exceptionnel (ce n’est pas leur métier en même temps), mais je trouve que la musique composée par Justin Hurwitz est sublime ! Personnellement, je ne m’en lasse pas !
J’aimeJ’aime
ils s’en sortent même très bien !!
J’aimeJ’aime
Techniquement le film envoie du pâté, les acteurs sont aussi très bons et le propos est intéressant. Cela dit, je n’ai pas accroché à ce film qui m’a paru trop long et qui m’a frustrée musicalement. De plus, il ne m’a pas trop émue…
J’aimeAimé par 1 personne
Hello!
J’ai adoré ce film! Il incarne vraiment quelque chose, l’univers du rêve peut-être… Certes l’univers du rêve c’est des couleurs vives, de belles musiques mais c’est aussi des désillusions et pas forcément un happy end… Bref j’ai vraiment accroché 😉
Lune
http://leslecturesdelune.blogspot.fr/
J’aimeJ’aime
Même enchantement de mon côté !
Joli sous-titre au passage, digne d’une fan de Bowie. (« dancing in the street » aurait aussi pu faire l’affaire mais c’est vrai que le morceau partagé avec Jagger n’est pas terrible)
J’aimeAimé par 1 personne
… Et très beau texte de surcroit.
J’aimeAimé par 1 personne
Difficile de résister au charme de La La Land !
… et merci pour le compliment !
J’aimeJ’aime
J’hésite à regarder ce film. J’ai un peu peur de ne pas supporter les passages musicaux, car j’ai beaucoup de mal quand les personnages d’un film se mettent à chanter. Après, étant donné toutes chroniques positives publiées sur La La Land, je me dis qu’il faut tenter le coup malgré tout !
J’aimeJ’aime
A reblogué ceci sur heart1001 (e-motions & movies).
J’aimeJ’aime
Etant, une amatrice de comédie musicale, j’avais de grands espoirs avec ce film et je n’ai pas été déçue !
J’aimeAimé par 1 personne
Magique 😍
J’aimeAimé par 2 personnes
J’adore lire les avis sur ce film, ça me fait revivre ce que j’ai ressenti et la magie aussi … et puis voir à quel point il a plu et que je ne suis pas la seule a avoir succombé ☺
J’aimeAimé par 2 personnes
Et comme tu as pu le lire aussi j’ai été bavarde en 2 articles sur le sujet ^^
J’aimeAimé par 1 personne
Il y a tellement de choses à dire sur ce film… Toujours plus de magie et d’amour à chaque vision ! Il n’y a pas un jour sans que je fredonne une chanson du film, il m’accompagne partout où je vais !
J’aimeAimé par 2 personnes
J’ai revu hier soir les Demoiselles de Rochefort et immédiatement, l’ouverture m’a ramené sur l’autoroute de Lala Land ! 🙂
J’aimeJ’aime