The Mindy Project (saison 5) ~ Mindy Kaling

À la fin de sa quatrième saisonThe Mindy Project nous avait laissés face à un dilemme : qui choisirait Mindy ? Jody, le docteur charmant et arrogant avec qui elle n’a pas « l’étincelle », ou bien Danny, son ex-fiancé en route pour l’autel avec une autre femme, mais qui a clairement encore des sentiments pour elle ? Cette question nous laissait présager une cinquième saison exploitant ce triangle amoureux jusqu’à l’usure et un rapprochement entre Mindy et Danny qui finirait par sceller leur réconciliation. Cependant, détournant toutes les attentes de ses fans, la créatrice Mindy Kaling choisit une autre voie : la série évacue notre interrogation dès son premier épisode, en évinçant totalement le personnage de Danny de la saison entière (l’acteur Chris Messina étant occupé sur d’autres tournages). Une autre question nous taraude alors : la série peut-elle survivre sans son personnage masculin principal ?

A priori oui, puisque le premier épisode nous promet une émancipation inattendue : à la manière d’une Bridget Jones courant sous la pluie pour rejoindre l’amour de sa vie, Mindy va annoncer à ses deux prétendants qu’elle préfère rester célibataire et prendre du temps pour elle. Une décision qui remettait joyeusement en cause les enjeux de la série, presque exclusivement centrée sur la « chasse » amoureuse sans répit de son héroïne et ses rêves de romance parfaite. Malheureusement, ce projet-là ne dure pas longtemps, puisque dès le deuxième épisode, Mindy tombe sous le charme de Ben, un jeune infirmier divorcé et père d’une adolescente de treize ans. La promesse d’une indépendance féminine s’étiole alors et Danny, notre italien macho préféré, se voit donc remplacé par un jeune premier un peu lisse, qui n’a pas grand-chose à apporter à la série à part une tête d’ange et quelques disputes un brin répétitives.

La saison 5 de The Mindy Project s’intéresse alors bien moins au personnage de Ben qu’à l’évolution de Mindy à son contact. La jeune femme, qui a toujours rêvé d’épouser un homme blanc, beau, riche et conforme aux acteurs des comédies romantiques qu’elle adore, se confronte à ses propres chimères lorsqu’elle découvre que son nouveau petit ami n’est pas de ce bois-là. Habitant le New Jersey plutôt que le chic Manhattan, petit infirmier plutôt que grand docteur, passionné de geekeries en tous genres plutôt qu’intello-bobo, « Basic-Ben » est un garçon lambda sans prétention ni rêves de gloire. Depuis toujours autocentrée et fascinée par la vie des stars, Mindy devra se remettre en question pour sauver sa relation naissante, en faisant preuve d’altruisme et d’ouverture à l’autre. Ces actes salvateurs se cristallisent avec humour et tendresse dans l’épisode 8, où Mindy revit cent fois la même journée comme dans le film Un Jour sans fin, pour enfin apprendre de ses erreurs.

Le temps d’un épisode, la série s’éloigne même des tribulations sentimentales de son héroïne pour s’intéresser à sa carrière professionnelle. Dans l’épisode 12, Mindy postule pour devenir dirigeante du service obstétrique de l’hôpital. Face à un jury « digne d’un film de Clint Eastwood », composé uniquement d’hommes blancs dans leur soixantaine, Mindy n’est pas prise au sérieux. Sont mises sur le tapis son aptitude à gérer ses émotions féminines sur son lieu professionnel et sa capacité à combiner un travail stressant et l’éducation de son enfant, sachant qu’elle est une mère fraîchement célibataire. Après avoir subi ces questions sexistes, Mindy s’interroge : sa vie serait-elle plus facile si elle était née dans la peau d’un homme blanc ? Le lendemain, la jeune femme se réveille sous les traits d’un caucasien blond et athlétique et découvre les privilèges qui sont les siens, dans une société où les femmes et les personnes de couleur ne sont pas encore considérées à leur juste valeur professionnellement parlant, mais également dans leur quotidien et leurs relations avec les autres. Dans cet épisode éminemment engagé, Mindy Kaling prône une entraide entre les privilégiés de ce monde et les laissés-pour-compte, mais encourage également les minorités à se soutenir mutuellement, pour plus d’humanité et moins d’inégalités.

Moins passionnante dans sa trame sentimentale que dans ses élans militants – la série aborde également les différences salariales en milieu hospitalier et les relations homosexuelles -, The Mindy Project se montre pourtant, dans sa cinquième saison, toujours aussi savoureuse. Grâce à la fantaisie de son héroïne drôle et romantique, et des personnages secondaires qui reprennent forme après un passage à vide dans la saison dernière – Jeremy trouve peu à peu la voie d’une relation sérieuse et Morgan, éternel bon copain, se montre touchant face à son incapacité à trouver le grand amour -,  la série ne perd rien de sa volonté de dépeindre les tribulations amoureuses et professionnelles d’une femme d’aujourd’hui et de sa capacité à réinventer la comédie romantique en y insufflant une bonne dose de réalisme. Ce procédé est d’ailleurs repris à la fin du dernier épisode, dans une situation de romance ultime : alors que Mindy va enfin concrétiser son rêve de mariage, son regard inquiet, qui constitue le cliffhanger en demi-teinte de cette cinquième saison, nous abandonne emplis de questions, bien plus soucieux que rêveurs.

5 réflexions sur « The Mindy Project (saison 5) ~ Mindy Kaling »

  1. Coucou Emilie ! je découvre cette série grâce à toi. J’ai un peu de retard en la matière 😉 Le sujet me plais. Fou comme on s’attache à des personnages que l’on retrouvent d’épisodes en épisodes. Merci pour ce joli partage, je te souhaite un excellent weekend 🙂

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    1. Tu as raison, on s’attache nettement plus aux personnages sur la longueur de plusieurs saisons que sur la durée d’un film. Je m’éloigne (malheureusement) de plus en plus du cinéma pour plonger dans les séries télévisées. C’est presque devenu mon plat principal ! 😉 Mindy fait partie de mes coups de cœur, j’espère qu’un jour elle sera un peu plus connue en France !
      Bonne soirée Frédéric et à bientôt ! 🙂

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      1. Il faut dire aussi que le cinéma est en crise avec de moins en moins de prise de risque des grands studios. C’est un terrible constat mais je n’en peux plus des reboots, des suites de suite et des re-reboots ^^ ;)j’exagère un petit peu pour sourire mais il y a de cela. Quand je vois que l’attente se cristallise autour de Star wars.. ça a plus de 40 ans.. alors que font les studios mis à part flairer le filon et tirer un maximum de profits. Fort heureusement, on a ici et là des îlots de résistance mais pour combien de temps encore ? A l’inverse, certaines très bonnes séries valent bien mieux, comme tu le dis si bien, que des paquets de films hollywoodiens sans inspiration. Les séries sont de plus en plus regardées. Et si netflix avait un temps d’avance sur les pontes du cinéma ? Belle soirée Emilie! @très vite 🙂 ps: je vais jeter un coup d’œil à cette série 🙂

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        1. C’est tristement vrai ce que tu dis là. Les films « indépendants » artistiquement et qui sortent du lot se font de plus en plus rares… Les studios sont tellement attirés par l’argent, et les gens n’y voient que du feu ! Tant qu’il y aura des spectateurs pour consommer (c’est bien le mot, consommer), ce genre de cinéma, il existera encore et toujours. Globalement, je trouve cette année 2017 incroyablement pauvre de très bons films par rapport à l’an dernier… Ça va être dur de dresser un top de l’année aussi riche que celui de 2016.
          Netflix est tellement en avance qu’on l’a sifflé au Festival de Cannes pour son film Okja. Apparemment, ce n’est pas cinéphile de voir des films sur internet ou produits par des plateformes en ligne… Quand c’est une série par contre, on l’encense. Cherchez l’erreur.
          De plus en plus de cinéastes se mettent à la série télévisée, je crois que certains y trouvent une plus grande liberté de création (récemment Fincher avec Mindhunter, a réussi à prendre totalement la main sur l’écriture du scénario, à tel point que la série s’inscrit dans la continuité de son oeuvre). Même chez eux, il y a une sorte de mépris du cinéma qui commence à pointer. En repensant à Silence de Scorsese, que nous avons aimé tous les deux, je ne peux m’empêcher de penser que c’est une réaction à tous ces blockbusters bruyants et sans âme.
          Bref, je pourrai continuer à parler de ça pendant des heures, mais ce qui est sûr, c’est que le cinéma et notre mode de consommation de l’image sont en train de vivre une révolution !
          Bonne journée Frédéric et merci pour cet échange ! 🙂

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          1. Tu as tout dit Emilie. On a la même analyse du mal qui ronge le cinéma contemporain. C’est une révolution comme tu le dis si bien qui débouchera je l’espère sur une nouvelle génération d’acteurs, réalisateurs de talent. Belle soirée à toi Emilie ! Merci, @bientôt 🙂 🙂

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